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Bizerte


Bizerte ou Benzart (بنزرت) est une ville du nord de la Tunisie située entre la mer Méditerranée et le lac de Bizerte. Elle est le chef-lieu d'un gouvernorat peuplé de plus d'un demi-million d'habitants


Géographie
Elle se trouve à une soixantaine de kilomètres au nord-ouest de Tunis, la capitale du pays, et à cinq kilomètres du cap Blanc, la pointe septentrionale de l'Afrique.

Histoire
Petit comptoir fondé aux environs de 1100 av. J.-C. par les Phéniciens, la ville passe sous l'influence de Carthage après la défaite d'Agathocle pendant les guerres puniques. Elle est ensuite occupée par les Romains sous le nom d'Hippo, Hippo Accra, Hippo Diaritus ou Zaritus. Sa conquête efface d'un trait neuf siècles d'histoire punique. Démantelée, la ville voit son territoire passer sous la coupe d'Utique qui prend le parti de Rome. Il faudra longtemps pour qu'une nouvelle ville romaine s'érige à la place du site punique d'Hippo Diarrhytus. Son nom arabe, Banzart, dérive d'une déformation phonétique de son nom antique2.
La ville est ensuite conquise par les armées musulmanes qui lui donnent son nom actuel. À partir de 1050, le déferlement destribus hilaliennes provoque l'effondrement de l'État ziride et le pays éclate en une multitude de petites principautés indépendantes. Bizerte n'échappe pas à la tentation séparatiste. La restauration de l'autorité almohade annonce une nouvelle rupture : quelques 20 ans plus tard, l'Ifriqiya accède au statut de province autonome et voit émerger la dynastie hafside.
En 1535, les troupes de Charles Quint prennent la ville, mais les Ottomans les chassent en 15743. Elle connaît alors, grâce à son port, sa première grande période de prospérité. C'est alors une base de course associée à Tunis4 et le nombre des captifs chrétiens dépasse les 20 000 au début du XVIIIe siècle. En réaction, la ville subit le bombardement de la marine duroi de France en 1681. Les 4 et 5 juillet 1770, l'escadre du comte de Broves bombarde à nouveau la ville et détruit les installations du port. En 1784 et 1785, ce furent les Vénitiens qui bombardent la ville et le port avec des bombes incendiaires5.
L'abolition de la piraterie en 1818 aurait pu porter un coup fatal à Bizerte mais le lac, dans lequel se reproduisent dorades, soles, mulets, loups et pageots si faciles à piéger quand ils regagnent la mer en empruntant le chenal qui traverse la ville, compense pendant quelques années ces pertes de revenus. Les Bizertins deviennent donc pêcheurs et c'est par centaines de tonnes que le poisson est exporté chaque année vers Tunis, l'Italie et la France. En 1786, un décret beylical accorde à la France les droits exclusifs de la pêche du corail. Les contrebandiers suivent aussitôt et, en 1800, on estime le nombre de corailleurs à 8 000.Génois, Catalans, Vénitiens, Siciliens, Pisans, Corses et Marseillais, ils fondent nombre d'entrepôts et de commerces dans l'îlot de R'baâ mais ne mettent qu'une cinquantaine d'année à détruire les massifs de corail. En 1850, ils ne sont plus que 2 000.
La France obtient la primauté de la ville lors du traité de Berlin en 1878 et entreprend alors la construction d'un grand port militaire6 sur le modèle de celui de Toulon du fait du rôle stratégique de la ville sur le canal de Sicile. Ainsi, un canal est creusé pour relier la mer Méditerranée au lac de Bizerte où est aménagée une rade. De l'autre côté du lac est fondée la cité de Ferryville qui est appelée aujourd'hui Menzel Bourguiba.
En décembre 1920 le gouvernement français autorise l'escadre russe de l'armée des volontaires à se réfugier à Bizerte. Elle y restera jusqu'à sa dissolution définitive en1924. Lors de la Seconde Guerre mondiale, la ville est occupée en novembre 1942par les Allemands puis, après l'avoir bombardée de nombreuses fois, les Americains la reprennent le 7 mai 19437.
Malgré l'indépendance accordée à la Tunisie en 1956, la France conserve la base de Bizerte jusqu'au 15 octobre 19638, ce qui entraîne de nombreuses tensions entre la Tunisie d'Habib Bourguiba et la France de Charles de Gaulle qui atteignent leur paroxysme lors de la crise de Bizerte.
La ville est aujourd'hui tournée vers le tourisme malgré la forte présence de l'armée tunisienne, Bizerte étant la plus grande base aérienne de Tunisie.

Démographie
La municipalité compte une population de 114 371 habitants au terme du recensement de 2004 mais on peut estimer la population de son agglomération, comprenant également Menzel Jemil et Menzel Abderrahmane, à environ 150 000 habitants.
Les Bizertins sont les descendants d'immigrés arabes et berbères d'Algérie, fuyant les années de sécheresse de la fin du XIXe siècle, de musulmans d'Andalousie, de slaves musulmans de l'Empire ottoman, de Siciliens, de Corses, de Sardes, de Maltais et de Russes blancs9 installés à Bizerte après la Révolution russe de 1917. Les habitants d'origine européenne et la petite communauté juive ont quitté la ville progressivement avec l'indépendance de la Tunisie le 20 mars 1956, le départ des forces françaises stationnées dans la ville le 15 octobre 1963et la nationalisation des terres détenues par les colons le 12 mai 1964.

Infrastructures
Bizerte présente plusieurs atouts grâce à ses nombreuses infrastructures. Elle est en effet reliée à la capitale par une autoroute de 51 kilomètres qui permet à la ville d'être à moins de 45 minutes de Tunis et de l'aéroport international de Tunis-Carthage. Elle est également reliée par une voie rapide à Menzel Bourguiba et à son chantier naval. Elle est par ailleurs reliée à la capitale par une ligne ferroviaire.
Un port de plaisance, un port de pêche et un port de commerce10 complètent l'ensemble.

Projet français
Avant les travaux menés par les Français, la communication entre le lac et la mer est établie par deux canaux prenant leur origine dans le vieux port et se rejoignant avant d'atteindre le lac. Leurs contours donnent un aspect original à Bizerte qui est surnommée la « Venise africaine » avec son « pont des Soupirs ». Ces deux canaux envasés et n'ayant qu'une profondeur de un à deux mètres ne peuvent être facilement utilisés pour la navigation de grands navires.
Aussi les nouvelles autorités du protectorat eurent l'idée de couper l'isthme de sable qui sépare le lac de la mer et de créer un nouveau chenal et un nouveau port à l'est de la ville. Le chenal mesurera 800 à 900 mètres de long, 100 mètres de large et neuf mètres de profondeur afin que le nouveau port puisse devenir le plus important de Tunisie et le quatrième de l'Afrique française après Oran, Philippeville et Bône. L'amiral Théophile Aube, pendant son passage au ministère de la marine, projette de transformer le vieux port mais ne peut que faire opérer quelques dragages et c'est en 1890 que commencent les travaux concédés à la maison Hersent et Couvreux pour mettre en communication le lac avec la mer et transformer la rade en un abri sûr. Dans ce but, on décide de construire deux grandes jetées, d'une longueur d'environ un kilomètres chacune, protégeant une étendue de littoral de 1,8 kilomètres et formant un avant-port d'une superficie de plus de 100 hectares. Entre les musoirs des deux jetées, une ouverture de 400 mètres permet l'entrée simultanée et facile de plusieurs navires. Pour accomplir cet important travail, la Société du port de Bizerte utilise la carrière d'Aïn Meriem, située à quatre kilomètres au nord de la ville, qui fournit les blocs de granit qu'un chemin de fer à voie étroite amène jusque sur la digue. Les jetées, une fois terminées, protègent l'entrée du chenal contre les tempêtes et l'envasement.
Rôle économique
Favorisé par sa position stratégique sur l'axe traversant la mer Méditerranée et le développement des zones industrielles de la région (Menzel Bourguiba, Menzel Jemil et Utique), le port de Bizerte a vu transiter 4 790 313 tonnes de marchandises en 2006 dont la quasi-totalité dans le cadre du trafic international11. Près des deux tiers des marchandises sont destinés à l'Europe et près des deux tiers sont constitués d'hydrocarbures11.
L’accès au quai de commerce et au bassin de Menzel Bourguiba se fait par un canal, traversé par le pont mobile, large de 75 mètres et disposant d'un tirant d'air de 13 mètres. Par ailleurs, avec ses quatre bassins de radoub sur le lac de Bizerte et leurs installations, le chantier naval présente des avantages comparatifs par rapport aux chantiers du nord de la Méditerranée grâce à une main d'œuvre qualifiée et à un coût compétitif11. En outre, la proximité du réseau ferroviaire, l'accès à l'autoroute Tunis-Bizerte ainsi que la voie rapide reliant Menzel Bourguiba à Bizerte confèrent au site les atouts d'un port moderne.
La ville n'a pas réussi à s'ériger en pôle touristique. Mais, dans un avenir proche, la ville va se doter d'un pôle de tourisme de plaisance : Marina Cap 3000. Il s'agit d'un grand port de plaisance doté d'une croisette comportant commerces et restaurants, d'un parking d'une capacité de 450 places et d'une composante immobilière de résidences de haut standing. L'ensemble du projet doit être prêt courant 2012.



Bizerte
à l'antiquité


Vue pittoresque de l'enceinte fortifiée du vieux port de Bizerte, point septentrional de l'Afrique (1958)

L'angle Nord-Est de la Tunisie, face au canal de Sicile, un large chenal fait communiquer la mer à un vaste et profond lac ceinturé de montagnes: c'est le site de Bizerte, port naturel et forteresse incomparable.
Là s'élevait autrefois, la ville phénicienne d'Hippo Diarrythus. Désignée depuis l'arrivé de l'Islam, au VIIème siècle, sous le nom de Benzert, la ville fut soumise au protectorat de Charles Quint en 1535 pour un temps assez court. Le Dey Youssef en restaura au XVIIème siècle le port Sidi Salem et la dota de belle fontaines. Lors de la période contemporaine, le creusement d'un canal permettant l'entrée dans le lac des grands vaisseaux de guerre avait été commencé en 1891; les dragages dépassèrent 2 millions de mètre cubes.
Deux jetées de 1 km chacune furent construites en même temps et délimitant un avant-port de 86 Ha.
Au fond du lac de Bizerte, bassin bien abrité de plus de 100 km de superficie où les fonds de plus de 10 mètres comptent pour plus du tiers, se trouve l'arsenal maritime de Menzel Bourguiba, anciennement Ferryville. L'arsenal, situé à 15 km de la mer et pourvu d'installations complètes, est capable de recevoir les plus puissants navires.
Bizerte est non seulement un des plus grands ports militaires de la Méditerranée, mais aussi un remarquable port de commerce.
Depuis la guerre, et malgré une certaine stagnation du trafic, l'extension du port qui a été menée à bonne fin a eu pour but de permettre le transite de navires à fort tirant d'eau par la création de ports d'accostage en eau profonde.
Le port de commerce de Bizerte, déjà outillé pour l'importation des carburants et l'exportation des céréales et des minerais de fer, présente aujourd'hui une zone portuaire, des magasins, des docks et une gare maritime.
Vue aérienne de Bizerte, port naturel et forteresse incomparable. Au premier plan, le bassin des pêcheurs, au fond, le grand chenal (1959)